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Débats à l'Assemblée Nationale 17 février 2015
M. Alain Rousset. Et si nous disions simplement aux Français que le principe de responsabilité est, en 2015, un progrès de la démocratie ? Qui fait quoi dans la République décentralisée ? Qui est responsable de quoi ? Qui rend compte aux électeurs ? Qui évalue ses propres politiques ? Qui n’organise pas la promenade du chômeur, pour savoir à quel organisme il doit s’adresser, ou celle du chef d’entreprise, pour déterminer s’il doit passer par la BPI, par la région, par la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi, voire par l’État ? N’est-il pas possible d’adopter un modèle qui marche, à l’échelle européenne, et de se fixer quelques objectifs ?
Rappelons-nous d’abord que l’emploi est la première cause d’inégalités, et que le chômage est la première des souffrances humaines et territoriales. Ne peut-on pas regarder ce qui marche en Europe ? Ce qui fonctionne, c’est le couple région-PME. Et si nous sortions de cette culture un peu étatique des grands groupes pour nous occuper des entreprises qui créent réellement de l’emploi, c’est-à-dire des PME, des entreprises de taille intermédiaire, des start-ups et des petites entreprises ? Et si nous aboutions l’État et la région ? Et si nous faisions en sorte que le financement de l’économie soit réellement régionalisé, comme il l’est dans tous les autres pays d’Europe, avec l’efficacité que l’on sait ? Savez-vous, mes chers collègues, qu’entre une PME française et la même PME allemande, la différence d’accompagnement et d’aides varie de 1 à 10 ? Comment peut-on être compétitif malgré ce degré de différence ?
Quant aux inégalités territoriales, le modèle républicain actuel les a-t-il empêchées ?
Mme Marylise Lebranchu, ministre. Non !
M. Alain Rousset. L’appareil d’État, dans son organisation déconcentrée actuelle, a-t-il permis d’empêcher cela ? La formation et l’accompagnement des PME ne sont-ils pas des compétences qui pourraient être confiées aux régions ?
M. Michel Piron. Ah si !
M. Alain Rousset. Je pourrais vous citer dix exemples, dans toutes les régions françaises, qui montrent la réussite de ces collectivités dans l’exercice de ces compétences.
Allons plus loin et évoquons le service public de l’emploi – je parle ici de l’accompagnement des chômeurs. Pouvons-nous être satisfaits de notre système ?
M. Gérard Charasse. Certainement pas !
M. Alain Rousset. Devons-nous avoir peur d’une grève des agents de Pôle emploi pour réformer le système ? En Allemagne, 153 conseillers accompagnent 10 000 chômeurs, alors qu’en France, 173 conseillers accompagnent le même nombre de chômeurs, parce que les coûts de structure sont de 10 % supérieurs en France, parce que notre modèle d’accompagnement des chômeurs est complètement émietté.
M. Michel Piron. C’est un effet de la centralisation !
M. Alain Rousset. Ce chiffre est incroyable : 173 conseillers pour 10 000 chômeurs.
M. Éric Straumann. C’est de la bureaucratie !
M. Alain Rousset. Ce n’est pas de la bureaucratie, c’est de l’émiettement entre les missions locales, les agences de Pôle emploi, les plans locaux pluriannuels pour l’insertion et l’emploi – les PLIE – et les maisons de l’emploi. Dans le cadre d’une réforme qu’il avait soumise aux régions, Jean-Louis Borloo avait voulu créer les maisons de l’emploi pour regrouper toutes ces structures et avoir un vrai patron. Or les maisons de l’emploi ont constitué un organisme supplémentaire.
M. Serge Grouard. Non, elles en ont regroupé d’autres !
M. Alain Rousset. N’est-il pas temps de passer à un autre système ?
Ne faut-il pas aussi, en matière d’environnement, de protection de la biodiversité et des espaces naturels sensibles, de développement des énergies renouvelables, déterminer un seul et même responsable ? Je pourrais égrener les compétences. Je vous remercie, madame la ministre, d’avoir contribué, d’une certaine manière, à préciser les compétences, même si, comme vous le savez, cela ne va pas jusqu’où je le souhaite.
La décentralisation, que je ne retrouve certes pas dans ce texte, même si c’est la volonté du Président de la République et du Premier ministre, n’est-elle pas aussi un moyen d’économiser de l’argent public…
M. Serge Grouard. Bien sûr que si !
M. Alain Rousset. …et de renforcer les moyens que l’État consacre aux missions régaliennes de sécurité et de défense ?
M. Serge Grouard. Cela devrait l’être !
M. Alain Rousset. J’ai déjà expliqué, en commission de la défense, que nous ne pourrons pas augmenter à nouveau les moyens de l’armée si nous ne touchons pas à la déconcentration. Dans les préfectures, 90 000 emplois doublonnent 24 000 emplois des régions. Cela ne doit-il pas nous faire réfléchir ?