La Nouvelle République 1er février 2013
" Un reportage à charge, mais juste "
Invité à débattre ce soir après la diffusion de « Pôle emploi : mission impossible », le ministre du Travail, Michel Sapin, a cédé sa place à Jean-Patrick Gille, député socialiste d'Indre-et-Loire et vice-président de la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale.
Pendant une heure, il échange ses points de vue avec le directeur général de Pôle Emploi, Jean Bassères, le représentant du SNU pôle emploi, Philippe Sabater et Marie Lacoste du MNCP (mouvement national des chômeurs précaires).
Pourquoi avez-vous été invité à ce débat ?
Jean-Patrick Gille : « Je crois que c'est tout simplement parce que le reportage illustre le rapport que j'avais fait sur le budget travail-emploi au projet de loi de Finances pour 2013, parce que j'y ai souligné les dysfonctionnements de Pôle emploi »
Ce reportage reflète-t-il honnêtement la réalité ?
« C'est un document à charge, mais juste, parce qu'il retranscrit la réalité des conditions de travail des conseillers de Pôle emploi et qu'il décrit bien ses problèmes d'organisation, son approche beaucoup trop administrative du travail. Les conseillers gèrent davantage des statistiques et des mesures que réellement des personnes et leurs parcours. C'était connu du temps de l'ANPE, déjà trop centralisée. La fusion avec les Assedic pour créer le Pôle emploi s'est faite par le haut et a donc renforcé ce caractère bureaucratique. »
Comment sortir de cette situation ?
« On essaie de présenter des solutions qui ont d'ailleurs – soyons honnêtes – déjà été engagées par la nouvelle direction de Pôle emploi, qui a signé un nouveau projet, qui consiste à différencier les parcours et notamment les accompagnements des demandeurs d'emploi en fonction de leurs difficultés. Quand on veut instaurer une égalité pour tous, tout le monde finit par être un peu mal traité. Mieux vaut faire davantage pour les gens qui sont en très grande difficulté par rapport à d'autres qui ont une relative autonomie. Il faut sortir de cette fiction du suivi mensuel individuel qui n'est pas du tout tenu parce que le Pôle emploi n'a pas les moyens de le faire. Il faut différencier les parcours et l'accompagnement, mais aussi déconcentrer pour donner de l'autonomie aux agences. Il faudra, par ailleurs, dans la renégociation de la convention assurance chômage avec les partenaires sociaux, la simplifier fortement, car elle est trop complexe et ça contribue à énormément d'erreurs d'interprétation, et donc toute une série d'indus et d'impayés. »
Le marché de l'emploi manque aussi de transparence, non ?
« Oui, et je pense, pour ma part, qu'il est temps de mettre en place l'obligation de publier les offres. Un employeur qui embauche doit le faire savoir. Pôle emploi se fatigue pour collecter à peine plus de 16 % des offres. Le reste – l'immense majorité des offres, donc – lui échappe. Je crois que ça serait aussi un excellent moyen de lutte contre les discriminations. »